
« Le fait que des collectivités territoriales se soient investies dans un projet finalement très paysan, militant, alors même que ce n'est, a priori, pas leur cœur de mission, pour nous c’est important. Cela fait sens, pour la dimension territoriale du projet. Et le soutien de la communauté de communes du Trie et du Magnoac, qui a financé la construction de notre atelier, a d’ailleurs été essentiel. » Ainsi parle Julie Peyou, aujourd’hui salariée à temps partiel de L’odyssée d’engrain. Sise à Cizos, petit village des Hautes-Pyrénées, cette Société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) fabrique des pâtes à partir de blés anciens locaux.
À l’origine du projet, ayant germé courant 2013, une poignée de paysans – quatre ou cinq au départ, une douzaine aujourd’hui – désireux d’offrir aux blés anciens délaissés un nouvel élan. Le collectif a, au fil des ans, embarqué citoyens consommateurs, entreprises engagées et collectivités, dans l’optique de « se réapproprier sur le territoire la souveraineté alimentaire », poursuit Julie Peyou, qui s’est d’abord impliquée bénévolement dans l’aventure. Les paysans souhaitent alors réintroduire le blé Poulard d’Auvergne et le petit épeautre, deux variétés difficiles à travailler mais riches d’un point de vue nutritionnel et adaptées aux conditions environnementales locales. Dans le même temps, « ils ont cherché le moyen le plus pertinent pour valoriser ces semences, économiquement parlant… et le choix de la fabrication de pâtes, produit du quotidien, s'est très vite imposé », explique Julie Peyou.
Pour fabriquer et commercialiser ces pâtes, une SCIC – L’odyssée d’engrain – est créée, avec l’aide, notamment, du Groupement en agriculture biologique des Hautes-Pyrénées et d’une plateforme d’économie sociale et solidaire (ESS). La SCIC regroupe aujourd’hui 85 sociétaires, des personnes physiques pour l’essentiel, des personnes morales (type réseau Biocoop) et deux collectivités locales (la ville et la communauté de communes de Lannemezan) – certains des paysans porteurs du projet ayant leurs champs non loin.
50 km de la semence à l’assiette
Afin de disposer d’un atelier dimensionné au projet, la SCIC bénéficie très vite du soutien de la communauté de communes du Pays du Trie et du Magnoac (CCPTM - alors communauté de communes du Magnoac, engagée à l’époque dans une fusion avec la com com du Pays de Trie, effective au 1er janvier 2017). La collectivité propose à l’Odyssée d’engrain un terrain dont elle est propriétaire à Cizos, et finance la construction de l’atelier de fabrication de pâtes. Un système de location-vente doit permettre à la SCIC de devenir propriétaire des lieux à terme.
L’atelier est opérationnel début 2017. En 2020, une extension est construite, financée par la CCPTM, afin que la SCIC dispose d’un moulin et d’un espace de stockage. Pour Gérard Barthe, président de la CCPTM, cette implication est somme toute… « logique. Si les collectivités locales ne soutiennent pas ce type d’initiatives citoyennes locales faisant sens pour le territoire, qui le fera ? » Et ce projet « fait sens, pour le soutien à l’agriculture, la valorisation de produits locaux en circuits courts, ainsi que d’emplois, et de liens créés sur le territoire… » Tout particulièrement à l’heure de l’élaboration des projets alimentaires de territoire. « Comme le dit Julie Peyou, du champ à l'assiette, les pâtes de l'Odyssée d'engrain parcourent en moyenne moins de 50 kilomètres ! »
Dans les cantines scolaires
Aujourd’hui, L’odyssée d’engrain fabrique 25 à 30 tonnes de pâtes par an, à partir de semences cultivées sur le terroir commun aux Hautes-Pyrénées, au Gers et à la Haute-Garonne. Les grains sont moulus sur meule de pierre, et transformés en pâtes fraîches à Cizos. La SCIC – dont le chiffre d’affaires était en 2022 de 160 000 euros – a, qui plus est, permis la création de trois emplois salariés. Distribuées en épiceries locales, dans le réseau Biocoop, en Amap, sur les marchés… les pâtes le sont aussi dans les cantines scolaires – une douzaine, en écoles primaires et collèges, sur le territoire.
Et ce lien noué avec la restauration scolaire est pour la SCIC prioritaire. « C’est essentiel, pour l’apprentissage et la transmission sur la question du bien manger », souligne Julie Peyou. Les pâtes sont d'ailleurs vendues aux cantines scolaires à prix coûtant, et L’odyssée d’engrain anime régulièrement auprès des élèves des ateliers de sensibilisation.
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